370 citoyens des cinq continents se sont retrouvés dans le sud de l’Angleterre, du 18 au 20 septembre, afin de poursuivre un chantier ouvert il y a neuf ans : la transition vers des modes de vie plus sains et plus durables.
Ils sont anglais, américains, danois, colombiens, gambiens, hongkongais, français… Ils ont entre 20 et 80 ans. Et ils partagent une même ambition : changer le monde dans lequel ils vivent. La plupart d’entre eux sont impliqués dans le mouvement des villes en transition, mouvement né en 2006 à Totnes, une petite ville du sud-ouest de l’Angleterre, en réponse au pic pétrolier et au dérèglement climatique. C’est à une vingtaine de kilomètres de là que ces « transitioners » ont posé leurs valises et leurs sacs à dos pour trois de jours de débats, de discussions et de travaux pratiques. Une « conférence » internationale organisée par le Réseau des villes en transition basé lui aussi à Totnes. Objectif du réseau (organisation à but non lucratif) : encourager, mettre en relation et former les communautés qui s’engagent dans des initiatives visant à répondre à leurs besoins tout en réduisant la consommation d’énergie fossile et les émission de CO2.
Fonctionnant en groupes autogérés, les « transitioners » organisent des marchés alimentaires locaux, conçoivent des systèmes de production d’énergies renouvelables, créent des monnaies locales, ouvrent des recycleries et des « repair cafés » pour lutter contre le gaspillage et l’obsolescence programmée. Les projets de cette nature ne cessent de se développer sur tous les continents. Désormais, il existe des groupes dans cinquante pays. Et l’Angleterre n’est plus le centre du monde de la transition, comme le montre la diversité des nationalités représentées lors de cette conférence. Marissa Mommaerts, Etats-Unienne de 28 ans, fait partie de cette jeune génération qui a décidé de prendre en main son avenir. Directrice des programmes au sein de Transition US, elle travaille sur un programme de développement économique local auquel la conférence de ce week-end consacrait une journée entière. « Notre système politique est très affaibli par les grandes entreprises. Mais petit à petit, nous essayons de reprendre du pouvoir en investissant localement dans des entreprises indépendantes », déclare-t-elle.
Si les Etats-Unis comptent officiellement 160 initiatives de transition « et des centaines d’autres qui viennent de voir le jour ou dont nous n’avons pas encore entendu parler », l’Amérique latine est elle aussi en pleine progression, comme le montre l’importance de leur délégation à la conférence. Nombre d’entre eux mettent en avant d’autres dimensions de la transition devenues aujourd’hui incontournables, comme la transition intérieure. Andrea Giraldo, jeune Colombienne spécialisée dans les approches méditatives, est persuadée d’une chose : « Le moyen le plus fondamental pour commencer le changement, c’est la transformation intérieure. Si nous ne le faisons pas, la transformation collective n’aura pas lieu ou elle n’aura pas d’impact. » Andrea et ses amis brésiliens ou mexicains cherchent maintenant à se connecter les uns aux autres pour mettre toute l’Amérique latine sur les rails de la transition.
« L’Amérique latine est de plus en plus active», confirme Ben Brangwyn, responsable du développement international au Réseau des villes en transition. « Et pour la première fois, nous avons aussi des représentants africains ». Comme le gambien Alagie Manneh, qui a participé à un atelier sur l’énergie. « Nous avons un gros potentiel en Afrique dans l’énergie solaire », précise-t-il. Les mouvements de défense de l’environnement ont gagné plusieurs batailles en Gambie récemment, se félicite-t-il. « La production de plastique a été interdite et nous n’importons plus de semences OGM ni de légumes, afin de développer l’agriculture locale. »
La COP21 était également un des grands thèmes de la conférence. Plus de cinquante personnes ont participé à l’atelier ouvert organisé le dernier jour à l’initiative de deux représentants d’Alternatiba, le mouvement citoyen créé à Bayonne en 2013. Samedi 26 et dimanche 27 septembre, pas moins de 50000 personnes sont attendues place de la République, à Paris, à l’occasion d’un « grand festival des solutions pour le climat ». Les militants d’Alternatiba veulent montrer que les solutions aux dérèglements climatiques existent déjà et qu’elles sont entre les mains des citoyens. « Il y aura une bonne quantité de transitioners européens ce week-end à Paris », prévoit Etienne Lecomte, un des coorganisateurs de l’événement.