À Kingersheim (Haut-Rhin) se tient du 27 janvier au 6 février un rendez-vous national pour le spectacle vivant destiné à la jeunesse : Momix. Après une édition 2021 sans public, le festival accueille de nouveau les familles et les classes. Le directeur de cet événement partenaire de la CCAS, Philippe Schlienger, raconte combien cette édition est spécialement attendue.
Qu’est-ce qui distingue l’édition 2022 des précédentes ?
Philippe Schlienger : Avec 70 spectacles, la programmation est plus fournie que d’habitude. Elle reflète notre approche plurielle du spectacle vivant, avec du théâtre mais aussi du cirque, de la marionnette ou encore du spectacle musical, dans des esthétiques variées.
Si la majorité des spectacles, français mais aussi étrangers, s’adresse à l’enfance et à la famille, nous accueillons cette année 10 spectacles destinés aux ados à partir de 12 ans. Cela correspond à une tendance : de nombreux artistes s’adressent aux jeunes, en les mettant à contribution pour écrire leurs spectacles ou en détournant les outils numériques dont ils sont friands.
Cette fois, nous sommes particulièrement heureux de retrouver le public. Le regard des enfants, les moments passés avec eux, avant et après la représentation, toute cette fraternité nous a beaucoup manqué en 2021 !
L’an dernier, vous aviez maintenu le festival en le réservant aux professionnels. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Nous étions en période de couvre-feu et nous n’étions autorisés ni à présenter des spectacles ni à recevoir du public. Nous pouvions seulement accueillir un public de professionnels pour voir ce que l’on appelle des « sorties de résidence », ce que nous avons fait. Nous avons ainsi assuré la continuité du processus de diffusion des spectacles.
Il s’agissait de préserver l’économie du spectacle pour la jeunesse et de soutenir l’emploi en permettant aux professionnels du secteur d’exercer leur métier. Les artistes ont pu présenter leur travail à des programmateurs de théâtres publics de toute la France. Ces derniers ont, en quelque sorte, « fait leur marché » pour leur saison culturelle 2021-2022.
Comment voyez-vous le service public de la culture, dont vous faites partie ?
Il faut distinguer les productions culturelles qui répondent à une demande de divertissement et les productions artistiques qui privilégient une dimension créative forte. Les premières n’ont pas vocation à susciter des questionnements. Les secondes, oui : elles sont faites par des artistes qui cherchent à créer des œuvres avec une dimension poétique, qui témoignent d’une certaine lecture du monde. Elles demandent généralement un temps de gestation plus long : selon les projets et les compagnies, cela peut aller d’un an et demi à trois ans.
La différence entre ces deux productions est comparable à celle qui sépare les industries qui fabriquent du pop-corn et du soda et les petits producteurs locaux qui font pousser des légumes de qualité. Le service public permet à la population de rencontrer ces productions artistiques exigeantes dans des lieux culturels subventionnés, sur tout le territoire.
À l’occasion des 31 ans du festival, que souhaitez-vous mettre en avant ?
Nous voulons mettre en lumière la longévité du projet artistique que représente Momix, l’importance de travailler pour le bien commun avec une approche collective, et nous voulons remercier tous ceux qui ont cru et continuent de croire à la qualité du travail des artistes. Plus que jamais, nous souhaitons affirmer combien il est important de faire rencontrer le spectacle vivant à l’enfant.
L’expérience de spectateur peut aider ce dernier à mieux vivre avec les autres, à se dire qu’il fait partie d’une communauté solidaire malgré les différences. Nous défendons le fait que le spectacle vivant est un partage sensible. C’est le lieu d’une résonance organique : des vivants sur le plateau et des vivants dans la salle interagissent. C’est l’inverse de l’écran. Enfin, pour cet anniversaire, nous avions rêvé de liesse collective et de convivialité, ce qui ne sera malheureusement pas possible avec les gestes barrières.
Pour la troisième année, la CMCAS de Mulhouse et la CCAS animent un jury familial pendant Momix. Qu’est-ce que cela apporte au festival ?
En décernant un prix du meilleur spectacle, ces familles, adultes et enfants, partagent leur expérience de spectateurs. Pour nous qui sommes professionnels, il est intéressant de voir ce qui a pu les convaincre. Parfois, leurs choix rejoignent les nôtres, parfois, ils s’en distinguent. L’émotion est peut-être davantage présente parmi leurs critères de sélection. Ce jury apporte sans doute une vision un peu plus objective des spectacles.
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