Stella, Prune et Clément ont entre 14 et 24 ans. Quelles sont leurs pratiques ? Et quelle vision ont-ils des Activités Sociales ? Propos recueillis par Sophie Chyrek, Nicolas Chevassus et Thierry Marck. Photographies par Eric Raz et Julien Millet.
Stella Hombel, 14 ans, collégienne, CMCAS Languedoc. « Devenir ambassadrice signifie participer à une grande assemblée de jeunes et y faire entendre ma voix. »
« L’an passé, en 5e, j’ai été élue déléguée de classe. Une étape importante pour moi car elle m’a appris à m’exprimer en public, devant des adultes. Cette expérience me sera utile, maintenant que j’ai été désignée ambassadrice du projet éducatif de la CCAS. Dans le cadre d’un stage de 4e, je viens de passer une semaine en milieu professionnel à la CMCAS Languedoc où j’ai travaillé sur une campagne contre le sexisme. J’ai aussi appris qu’il existait des aides financières pour les familles qui n’ont pas les moyens de partir en vacances.
Moi qui pars en vacances depuis que je suis toute petite dans les centres de la CCAS, j’ai découvert l’envers du décor : tout ce travail que je n’imaginais pas pour préparer une colonie de vacances ou un séjour d’été Adultes. Grâce aux séjours de la CCAS, j’ai pu pratiquer des sports que je ne connaissais pas, comme le tennis, l’escalade, le paddle ou la randonnée. Je me souviens aussi d’un séjour où nous avions créé un spectacle, dans le cadre d’un club de jeunes. Je devais lire un texte en public. J’avais le trac, mais ça c’est très bien passé, et cela m’a beaucoup appris. Devenir ambassadrice signifie avant tout pour moi participer à une grande assemblée de jeunes et y faire entendre ma voix. Je compte insister sur un point : l’écoute et la prise en compte des attentes de chacun. »
Prune, 16 ans, lycéenne, CMCAS Tours-Blois. « Je crois qu’une vie réussie, c’est à la fois être heureuse et solidaire. »
« J’ai deux frères. Mon père travaille à la centrale de Chinon, ma mère dans un hôpital. Je suis interne, en 1re STI2D, une spécialité liée au développement durable. Je fais de la gym. J’aime le cinéma. Bien sûr, j’ai lu ‘Harry Potter’ et j’aime Saint-Exupéry. Je suis chanteuse dans le groupe rock de mon lycée. Le numérique ? C’est bien pour avoir des nouvelles et en donner. La télé ? Je peux m’en passer. L’école, c’est important, mais je trouve que le système d’évaluation privilégie trop le ‘par coeur’ sur le travail de groupe en autonomie, comme ce qui se passe en colo. Je ne connais pas le projet éducatif des électriciens et des gaziers… Mais je sais qu’en séjour, les encadrants font passer le message du respect et de la solidarité. C’est collectivement que l’on construit les activités, le planning et la vie quotidienne. Alors revoir le projet éducatif, peut-être, mais sans changer cette façon de faire !
La politique ? C’est un peu loin de moi. Sauf au printemps, dans le boulot de ma mère, les restrictions budgétaires ont failli lui coûter son poste à l’hôpital où elle est la dernière arrivée. C’était pendant les manifs contre la loi travail. C’était angoissant quand même. On discutait. De là à m’engager, je ne sais pas trop. Dans l’humanitaire, sûrement. Je crois qu’une vie réussie, c’est à la fois être heureuse et solidaire. La rater, c’est abandonner ses rêves. Le vrai échec, au fond, c’est d’y renoncer. »
Clément Gautreau, 24 ans, technicien agent de maîtrise EDF à la centrale de Nogent-sur-Seine (Aube), CMCAS Ardennes Aube Marne. « C’est une bonne chose de se remettre en question, de voir si l’on est toujours dans le bon tempo. »
« Je travaille à temps complet depuis trois ans. Mes loisirs : basket-ball, course à pied, vélo, natation et les moments entre copains chez les uns ou les autres. Parmi les réseaux sociaux, j’utilise surtout Facebook pour discuter, partager des expériences, notamment des contenus liés à mes voyages. Depuis que je suis embauché, je suis parti deux fois en voyage grâce à la CCAS. Une fois au Costa Rica, une fois aux Antilles. C’est surtout pour les activités de loisir que je passe par la SLVie (karting, paintball…), des activités que l’on pratique souvent entre collègues. Pour tout ce qui est culturel, j’ai l’impression de moins programmer et d’être plus ‘individuel’.
Ce qui m’a beaucoup plu ? Une virée d’un weekend à l’Europark entre collègues et aussi mes deux voyages. J’apprécie de pouvoir faire mes choix directement sur mon smartphone grâce à l’appli Ma CCAS. J’ai lu que les Activités Sociales souhaitaient réactualiser le projet éducatif. C’est une bonne chose de se remettre en question, de voir si l’on est toujours dans le bon tempo. Les valeurs du projet éducatif me parlent. Elles sont belles. Mais j’ai l’impression qu’en voyage, on les partage naturellement : vivre en communauté, c’est forcément être solidaire, ça rapproche, ça ouvre le dialogue. Appartenir à un groupe, c’est déjà rejoindre les autres. Quand il y a un objectif commun, comme un loisir ou un voyage, c’est plus simple de se retrouver sur des pensées. Je pense que naturellement, au sein d’un collectif, on partage des valeurs. »
Génération What ? En 2013 et 2016, deux consultations, intitulées Génération Quoi et Génération What, ont été réalisées par le Cevipof auprès de 320 000 jeunes âgés de 18 à 34 ans. De ce dispositif s’est dégagé un portrait reflétant les blocages sur lesquels butte la socialisation des jeunes générations dans la France d’aujourd’hui mais aussi leurs attentes et échappatoires. Entre pessimisme collectif et optimisme individuel, cette génération a intégré l’insécurité et l’impermanence pour en faire un modèle de vie. Elle a peu confiance dans la société comme dans ses institutions. S’ils savent qu’ils peuvent compter sur le soutien affectif et matériel de leur famille (87%), les jeunes interrogés portent aussi l’angoisse de leurs parents (64%). Ils jugent sévèrement un système éducatif qui ne donne pas assez sa chance à tous (68%). Les deux tiers des jeunes actifs considèrent ne pas être payés à la hauteur de leur qualification (65%). Et leur défiance envers le système politique est écrasante : 99% considèrent que les hommes politiques sont corrompus. Seuls 32% d’entre eux se montrent éventuellement disponibles pour un engagement partisan. Par ailleurs, ils sont 87% à n’avoir aucune confiance dans les médias. Près des deux tiers d’entre eux déclarent pouvoir participer à un grand mouvement de révolte. Enfin, 90% d’entre eux disent qu’ils ne pourraient pas être heureux sans amis. |
Quel projet éducatif pour nos Activités sociales ?La réactualisation du projet éducatif des électriciens et des gaziers – grand chantier de l’année 2016 – a rendez-vous au Cap d’Agde les 13 et 14 mai prochains. L’occasion de clarifier le regard que portent les Activités Sociales sur la société d’aujourd’hui et de bâtir ensemble des réponses contemporaines. |