Gilles Pereyron est secrétaire général de Droit à l’énergie SOS Futur. Implantée dans 68 pays, avec 400 organisations adhérentes, cette ONG dispose d’un mandat d’observateur consultatif au Conseil économique et social de l’ONU.
Comment appréciez-vous le débat sur la transition énergétique lancé par le président de la République ?
Gilles Pereyron : Le véritable enjeu est de garantir le droit à l’énergie pour tous, dans le cadre du réchauffement climatique. C’est donc un débat important, mais qui a été cadré par le président de la République de telle sorte qu’il n’aborde pas la question essentielle de la place des énergies fossiles, qui représentent 66 % de la consommation énergétique française. Le débat tourne ainsi presque exclusivement sur l’électronucléaire, qui ne représente que 18 % de la consommation d’énergie primaire en France. C’est très regrettable.
Pour quelle raison ?
Nous avons la chance d’avoir en France un outil de production énergétique très peu émetteur de CO2 : 90 g/kWh contre 400 en Allemagne et même 900 en Chine, du fait de l’utilisation massive du charbon ! La sortie du nucléaire envisagée par l’Allemagne implique la construction de trente centrales à charbon, alimentées par du charbon importé des États- Unis, qui sont devenus en surproduction charbonnière du fait de la ruée vers les gaz de schiste. C’est une aberration par rapport à l’objectif de limiter les émissions de gaz à effet de serre. Le nucléaire passe pour le grand méchant loup en France. Mais, objectivement, comme le reconnaît l’Agence internationale de l’énergie, la place du nucléaire va continuer à progresser dans le monde, ce qui permettra à de nouveaux pays d’accéder au droit à l’énergie de manière compatible avec l’objectif de limitation du réchauffement climatique.
Comment agir sur la consommation énergétique ?
Il faut bien entendu essayer de la réduire. On ne peut continuer la trajectoire actuelle de hausse ininterrompue de la consommation. Mais la seule réponse proposée aujourd’hui est d’augmenter les tarifs pour diminuer la consommation. Cela va à l’encontre du droit à l’énergie pour tous, alors même que la précarité énergétique se développe partout en Europe.