Gaziers et électriciens dans la Résistance

Gaziers et électriciens dans la Résistance | Journal des Activités Sociales de l'énergie | gazier de paris

Les journaux édités par les gaziers et électriciens résistants pendant la guerre sont conservés au musée de la Résistance nationale, et consultables en ligne sur le site de la Bibliothèque nationale de France. ©Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne (AAMRN)/gallica.bnf.fr/BNF

Dans les Industries électriques et gazières, la lutte contre l’occupation allemande entre 1940 et 1944 a été principalement le fait des organisations syndicales. Des journaux clandestins conservés au musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne – dont la CCAS est partenaire – sont une des rares sources d’information sur cette période.

Contrairement aux cheminots, avec le mouvement Résistance-Fer, ou aux postiers, avec le mouvement Résistance-PTT, les électriciens et gaziers n’ont pas créé, durant l’Occupation, une organisation de résistance propre à la corporation. La raison en est facile à comprendre : le secteur des Industries électriques et gazières (IEG) comptait alors plusieurs centaines d’entreprises, ce qui rendait la construction d’une organisation centralisée bien plus difficile que dans une entreprise nationalisée comme la SNCF ou une administration centrale comme celle des Postes et Télécommunications.

Seul le mouvement syndical était alors en mesure d’offrir une certaine unité aux électriciens et gaziers. C’est donc par cet intermédiaire que ces derniers ont participé à la Résistance dans les entreprises de l’énergie. Certains, bien entendu, se sont engagés contre l’occupant à travers des mouvements de résistance ou des partis politiques, mais cette activité ne concernait pas le lieu de travail proprement dit.

L’histoire du mouvement syndical des électriciens et gaziers sous l’Occupation est complexe. La comprendre nécessite un rappel du contexte historique. Après la Première Guerre mondiale, la France compte deux confédérations syndicales : la CGT, fondée en 1895, et la CFTC, fondée en 1919. Cette dernière est quasiment absente des Industries électriques et gazières. Quant à la CGT, elle se scinde en 1921 entre réformistes de la CGT, majoritaires dans la Fédération de l’éclairage, et révolutionnaires de la CGTU. Ces deux organisations se réunifient en 1936, dans une dynamique d’union préfigurant celle du Front populaire… mais se séparent à nouveau en 1939, lorsque la direction confédérale exclut les syndicats et militants – pour la plupart les anciens de la CGTU – qui refusent de condamner le pacte germano-soviétique.

La situation se complique encore lorsque le régime de Vichy, dont le ministre du Travail René Belin est un ancien dirigeant de la CGT tendance réformiste, dissout la CGT en novembre 1940… mais autorise les fédérations professionnelles, à condition qu’elles ne prennent aucune position politique.

Les journaux, émouvants témoignages de la lutte clandestine

Deux organisations syndicales coexistent donc de 1940 à 1943 dans les IEG : une Fédération de l’éclairage légale, dirigée notamment par Clément Delsol, qui mène un travail revendicatif sur les salaires et les conditions de travail, mais s’abstient de critiquer la politique du gouvernement de Vichy et l’Occupation ; et des comités populaires, animés par les anciens de la CGTU comme Marcel Paul et Émile Pasquier, illégaux, qui conjuguent action revendicative et lutte contre l’occupant et ses soutiens français.

En avril 1943, la CGT se réunifie à nouveau dans le cadre des Accords du Perreux. Cette réunification permet l’entrée d’un représentant de la CGT, Louis Saillant (par ailleurs entre aussi un représentant de la CFTC, Gaston Tessier), au Conseil national de la Résistance, qui tient sa première réunion sous la présidence de Jean Moulin le 27 mai 1943.

Alors que la lutte contre les départs au Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne enflamme les entreprises et provoque la création des premiers maquis pour abriter les réfractaires, la fédération légale perd vite toute crédibilité. Les militants de la CGT réunifiée, mais clandestine, diffusent en revanche leurs bulletins : « Le Secteur électrique » dans les entreprises de la région parisienne, « Force » à l’échelle nationale, ou encore « Le Gazier de Paris ».

Le « Gazier de Paris » et « Force », deux journaux respectivement édités par la direction illégale du personnel du gaz et de la Fédération de l’éclairage et des forces motrices en 1944. ©Musée de la Résistance nationale/gallica.bnf.fr/BNF

Une poignée de numéros de ces journaux clandestins, souvent réduits à une feuille recto-verso mal imprimée sur du mauvais papier, sont conservés au musée de la Résistance nationale, à Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne). Ces témoignages émouvants de la lutte clandestine ont été numérisés, et sont accessibles sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France.

Ils permettent de suivre l’action clandestine des syndicalistes, menant à la fois des batailles revendicatives, telle celle pour les 1 000 francs de salaire, et une démarche de collecte et de soutien en faveur des réfractaires au STO que traque la police de Vichy. Sans oublier les hommages aux électriciens et gaziers tombés au combat, qui sont accompagnés d’appels à les venger. Le Maitron recense 58 électriciens et gaziers fusillés comme otages ou comme résistants sous l’Occupation. Le nombre des déportés et celui des résistants dans la profession demeurent, quant à eux, inconnus. De nombreuses recherches restent à entreprendre pour mieux appréhender la participation de la profession à la libération du pays.

Révélateurs de toute la diversité de la Résistance, quelque 800 titres de la presse clandestine sont conservés au musée de Champigny-sur-Marne.

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