Ghislain Loussingui, un « accoucheur d’écriture » en tournée à la CCAS

Ghislain Loussingui, ancien rappeur devenu formateur en atelier d'écriture, intervient à la CCAS sous diverses formes.

Ghislain Loussingui, ancien rappeur devenu formateur en atelier d’écriture, intervient à la CCAS sous diverses formes, notamment dans le cadre des Act’Éthiques, cycle de rencontres et de débats qui ont lieu à la CCAS été comme hiver. ©Éric Raz/CCAS

Ancien rappeur au sein du collectif Bisso Na Bisso, Ghislain Loussingui anime des ateliers d’écriture dans toute la France, y compris à la CCAS, en vacances dans le cadre des Act’Éthiques ou en ligne sur ccas.fr. Il met l’accent sur la quête de sincérité et le partage qu’il fait germer en cultivant la bienveillance, et montre qu’avec « un stylo, une feuille et un sourire », on peut déjà « faire monde » ensemble.

Un atelier d’écriture peut avoir une visée créative ou thérapeutique. Quelle est votre approche ?

Ghislain Loussingui – Écrire, en soi, peut avoir une dimension thérapeutique, mais personnellement je ne me présente pas comme thérapeute : cela reviendrait à dire aux participants qu’ils ont potentiellement des problèmes à résoudre !

Je me vois plutôt comme un « accoucheur d’écriture », quelqu’un qui permet de transcender les maux par les mots. En fait, l’atelier se construit avec les gens. Chacun apporte son vécu et nous menons un cheminement créatif par l’écriture, ensemble. L’atelier est aussi un espace pour expérimenter, simplement, le plaisir d’écrire autrement.

Vous accordez une importance particulière à la parole. Quel rôle joue-t-elle dans vos ateliers ?

L’écriture en groupe demande une certaine confiance. En effet, il faut se sentir en sécurité pour lire ce que l’on a écrit aux autres. En réalité, bon nombre de gens ont une relation compliquée avec l’acte d’écriture. « Moi, je ne sais pas écrire…  » : cette phrase, je l’ai entendu très souvent en vingt ans. Comme s’il fallait une légitimité spéciale pour se dire « apte à écrire  » !

Ces blocages sont souvent liés à de mauvais souvenirs scolaires. Certains ont subi des moqueries à propos de leur orthographe. D’autres, à qui l’on a diagnostiqué des troubles dys, sont convaincus d’être incapables d’écrire. J’essaie d’accompagner les participants avec bienveillance et surtout avec de la considération.

Cela passe par l’accueil de chacun, de son histoire, de son état psychologique. J’explique que chacun est capable d’écrire, que nous sommes porteurs de choses intéressantes car nous sommes tous des témoins vivants de notre époque. Nous échangeons donc tous ensemble durant la séance. Le moment de l’écriture proprement dire arrive, lui, vers la fin. Ainsi, lorsque chacun se retrouve face à sa feuille de papier, il sait déjà ce qu’il veut raconter et c’est plus facile.

Avec son atelier « Un stylo, une feuille, un sourire », Ghislain Loussingui intervient dans divers établissements accueillant des jeunes (écoles, collèges, lycées) ou des personnes fragilisées (maisons de retraite, structures de réinsertion sociale, prison…). ©Éric Raz/CCAS

Mettez-vous en avant votre parcours d’artiste hip-hop ?

Si j’ouvre une fenêtre sur ma vie, c’est pour encourager les participants à s’ouvrir sincèrement. Je raconte surtout les étapes-clés de mon parcours, quand j’ai eu à me réorienter, à me reconstruire même. Je tiens à dire que tant qu’on est vivant, on peut se réinventer. Comme on dit, « il n’est trop tard qu’à la tombe » !

« Comment peut-on relier les hommes en deux heures… ? (rires) En accueillant l’autre avec le sourire, en s’asseyant en cercle, on restaure déjà le lien… »

Avec la CCAS, vous animez des ateliers pendant les vacances, en lien avec la thématique « Faire monde ». Comment cela se traduit-il concrètement ?

Cette thématique m’a inspiré ! À une époque où le monde semble s’effriter peu à peu, il me semble important de relier les Hommes. Sur cette question, le philosophe Albert Camus m’inspire beaucoup, en particulier son livre « Le premier homme », constitué de bribes de textes rassemblées de manière posthume.

Comment peut-on relier les hommes en deux heures… ? (rires) En accueillant l’autre avec le sourire, en s’asseyant en cercle, on restaure déjà le lien… Respecter le rythme de chacun, cela compte aussi. Dans une société où la frénésie nous emmène peut-être droit dans le mur, ralentir revient à s’octroyer un moment pour soi. On peut alors oser s’ouvrir. Avec le groupe, on fait cela ensemble, chacun fait sa part sans se préoccuper de ce que font les autres.

Comment préparez-vous vos ateliers ?

Je ne cherche pas à connaître les problématiques des personnes lors d’un atelier. En revanche, lorsque j’interviens dans des établissements scolaires ou des entreprises, je suis informé de la problématique observée dans ce lieu. Dans ce cas, j’élabore un programme afin de traverser la thématique ensemble, de trouver aussi des pistes de solutions.

Par exemple, dans un collège où il s’agit d’aborder le sujet du harcèlement, je vais préparer des exercices spécifiques. Le but est d’aider à libérer les témoignages, à trouver des solutions, et peut-être à se sentir en mesure d’aider d’autres personnes confrontées au harcèlement.

Quels fruits peuvent porter ces ateliers ?

J’essaie toujours de faire en sorte que ce qui a été produit au cours de l’atelier soit ensuite valorisé. Cela peut prendre la forme d’un recueil de textes, d’un enregistrement en studio, ou d’une exposition, car j’invite parfois les participants à peindre également. Cela dépend de ce qui est décidé avec l’organisateur.

Après ces rencontres, les participants m’envoient souvent leurs impressions. J’apprends que certains ont pris le chemin du soin par rapport à des problématiques compliquées qu’ils vivent, ou que d’autres, ayant goûté à l’écriture, continuent d’écrire. Beaucoup disent ressentir le bien que peut faire de « faire » ensemble dans une société qui pousse vers l’individualisme.


Envie de participer à un atelier d’écriture ?

Ghislain Loussingui, un "accoucheur d’écriture" en tournée à la CCAS | Journal des Activités Sociales de l'énergie | In Vivo Page 01

Programme des ateliers proposés par Ghislain Loussingui à la CCAS à l’automne et l’hiver 2023

Du 30 septembre au 9 décembre, Ghislain Loussingui anime un atelier d’écriture en ligne, accessible depuis ccas.fr. 

Pour participer, il suffit de s’inscrire !

S’inscrire à l’atelier

En savoir plus sur l’atelier d’écriture

Site internet : ghislainloussingui.fr

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