Le nombre d’actes médicaux à distance a littéralement explosé avec la crise sanitaire. Ce qui n’est pas sans poser quelques problèmes pratiques, mais aussi éthiques.
Toutes les crises accélèrent l’innovation : en France, celle du Covid-19 aura largement profité à la téléconsultation qui cherchait à s’imposer depuis quelques années. Rempart contre la propagation du virus dans les salles d’attente, son volume a été multiplié par 100 durant cette période, passant de 10 000 par semaine début mars à plus d’un million par semaine fin avril. Seuls 2 % des médecins la pratiquaient.
Désormais, un libéral sur deux est concerné. Selon l’Assurance maladie, 1 Français sur 10 a eu recours aux consultations en ligne depuis le confinement, et 30 % sont prêts à y recourir plus souvent à l’avenir. En mai, elle a été ouverte aux infirmiers, aux orthophonistes et aux sages-femmes. Il est vrai que ce nouveau moyen offre une souplesse organisationnelle appréciée des médecins comme des patients tout en répondant à la problématique de l’engorgement des salles d’attente et de celle des personnes les plus isolées.
« Assurer un meilleur suivi à leurs patients »
« Assurer plus de confort et de flexibilité dans leur travail, développer leur activité de consultation, assurer un meilleur suivi et un meilleur service à leurs patients » : dans cette publicité pour son service de téléconsultation lancé début 2019, l’entreprise franco-allemande Doctolib présente la téléconsultation comme un outil collaboratif entre médecin et patient, permettant d’améliorer le quotidien de chacune des deux parties.
Le service, actuellement facturé 39 euros par mois aux praticiens, en plus de l’abonnement à la plateforme Doctolib, est remboursé par l’assurance maladie.
De nombreuses questions éthiques
Depuis une dizaine d’années déjà, plusieurs pays européens, dont la Suède et la Grande-Bretagne, ont pleinement intégré la télémédecine à leurs parcours de soins. Cet engouement récent suffira-t-il à ancrer durablement la téléconsultation dans les usages ? Pour que la pratique se démocratise, encore faudrait-il que la question de la fracture numérique soit résolue, la téléconsultation nécessitant un écran (téléphone intelligent, ordinateur) et quelques connaissances des usages numériques.
Elle soulève par ailleurs des questions éthiques touchant à la relation entre le médecin et son patient. Dans le cabinet médical, la présence physique demeure un facteur d’humanité face à la souffrance ou à difficulté de la maladie. Par écran interposé, quid du réconfort apporté par la chaleur d’une écoute bienveillante du médecin ?
Nombre d’entre eux posent d’ailleurs une autre limite, celle de l’examen clinique : « On ne peut pas palper un ventre, ausculter, prendre une tension… » D’autres encore pointent la question de la conservation et de l’utilisation ultérieure des informations médicales. Pour ne pas passer à côté de l’essentiel de la relation patient-médecin, la téléconsultation devrait donc rester un moyen et non une fin.
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