Inédit : huit équipes mixtes se sont disputé la coupe Jean-Duflot, ou rencontre nationale sportive (RSN) de futsal, organisée par la CCAS et la CMCAS de Marseille du 26 au 28 mai derniers à Bouc-Bel-Air. Alors le foot, un sport sexiste ?
Le challenge s’annonçait délicat. Surtout pour un sport comme le football ! En imposant la présence d’une joueuse par équipe, la CCAS a sans doute voulu pourfendre les poncifs tenaces. Mais aussi prouver que le mélange des genres autour du ballon rond, ça tourne. Et en attendant la parité exacte (elles n’étaient que sept, ils étaient sept fois plus !), à Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône), l’initiative a séduit tout le monde. Sans fard ni faux-semblants. Mais pour Solène, Hélène, Émeline, Laurence, Léa, Élodie et Jessica, le but était de savoir si cette injonction ne serait pas un fardeau (pour elles et pour les garçons aussi).
Car si le football se féminise, la mixité n’est pas encore de mise (comme dans bien des sports d’ailleurs). Et les clivages hommes-femmes sont bien réels. Ils trouvent leur terreau dans la motivation surtout lorsqu’un trophée se profile à l’horizon. Alors, avec trois minutes de jeu minimum pour les filles, contre douze pour leurs coéquipiers, le règlement fleurait quelque part le sexisme. L’envie du sacre pencherait-elle plutôt vers le masculin ? Que nenni ! Au fil des matchs, tout le monde a joué le jeu, absorbé par l’enjeu et ce plaisir simple de se dépenser, de se surpasser dans la mixité… et entre collègues de travail.
« C’est cardio sur ce terrain ! »
D’ailleurs, dès les premières rencontres, les choix du règlement s’avéraient finalement judicieux. Les femmes moins physiques que les hommes au futsal ? Eh bien oui, de l’avis de Jessica, de l’équipe de la CMCAS Marseille, et d’Émeline de celle de Bourgogne. Cette dernière, ancienne basketteuse, avouera : « C’est cardio sur ce terrain ! Ça va être chaud de tenir douze minutes. Pour moi, trois ça suffit amplement. » De son côté, Jessica, à bout de souffle, a du mal à sortir les mots. « Mon but ? Tout simplement en marquer un… Après oui, c’est dur. Surtout avec mon handicap… mais je suis là ! Ça fait six mois que j’ai été mutée à Aix-en-Provence et c’est une bonne façon de renforcer les liens avec les collègues de travail. »
Un peu plus loin, à l’échauffement, sur le terrain 2, Brahim sourit. À l’évocation de sa partenaire Émeline, ses propos sont dithyrambiques et pleins d’attention. « Elle a marqué un but ! » Lui, le « battant », qui avoue « freiner ses ardeurs au contact d’une adversaire » apprécie cette « touche de féminité ». « Elle nous apporte de la jovialité. Elle nous tempère et ça nous aide beaucoup ».
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Pas de discrimination positive ou négative
Eh oui, la finesse, la délicatesse… Loin de toute flagornerie ou de démagogie de ma part (en tant que footeux d’ailleurs), il a suffi d’observer pour jauger. Prendre le pouls de cette tension croissante lorsque les filles étaient sur la touche. Au repos. Là, entre mecs, les coups bas, durs et vicieux quelquefois (mais toujours dans le respect des règles…) ressurgissaient de façon ostentatoire. Pour un jeu plus haché. Car si les femmes ne refusent pas le combat, elles l’abordent différemment. Et au foot, ça se voit.
Réponse cinglante à la discrimination « positive » et « négative »… la RSN de futsal a en tout cas pris le contre-pied. En démontrant que l’opposition de « styles » et la mixité fonctionnent quand la nature profonde de chacun et chacune se révèle vraiment. Bref, quand les hommes et femmes sont libres de leurs choix et de leurs expressions ! À Bouc-Bel-Air, la communion entre les êtres a chassé toute idée de tolérance et d’exclusion, deux principes basés sur des fondements sans fond et sur des appréciations douteuses. Et au micro, lors de la remise des récompenses, Jean-Christophe Fiandino, président de la CMCAS Marseille, soulignera : « Avec la mixité à l’ordre du jour dans cette RSN, nous sommes vraiment dans nos valeurs. »
En coulisses
« Je joue au foot depuis l’âge de 5 ans. Alors, quand on m’a proposé de venir, la question ne s’est même pas posée. Et pour moi le foot reste un sport mixte. Jouer contre des hommes ne m’effraie pas. Je n’ai jamais eu peur, c’est dans ma nature. »
Léa Coquet, 17 ans, CMCAS Ardennes Aube Marne
« J’ai appris le foot dans la rue… Depuis j’évolue dans un club féminin. Mais ma présence ici est due à un désistement. Donc finalement, on a appris à se connaître hier, à l’arrivée. Mais tout se passe bien. Et j’ai l’habitude d’être entourée d’hommes puisque dans ma SLVie, on a monté une équipe mixte, et je suis la seule fille pour l’instant… Alors je suis parée, et puis ils font attention à moi. »
Élodie Raniolo, 28 ans, CMCAS Nord Pas-de-Calais
Tags: Droits des femmes Futsal« J’encadre depuis trois ans l’équipe de futsal de notre CMCAS. C’est-à-dire que je fais attention aux choses que les hommes ne voient pas forcément. Des petits détails dans la préparation qui peuvent perturber le déroulement des matchs, des tournois et l’ambiance en général. Ils sont d’ailleurs assez respectueux de mes décisions, de mes choix. Et je pense qu’ils ont aussi besoin d’avoir ce regard de femme passionnée par le futsal. »
Laurence Aristide, 45 ans, CMCAS Guadeloupe