Une adolescente maligne, sensible et profondément intègre, découvre le monde impitoyable de la vie de bureau. Un récit d’apprentissage caustique et sans concessions sur l’adieu à l’enfance, en accès libre sur la Médiathèque des Activités Sociales jusque fin septembre.
Y a-t-il un âge pour devenir lanceur d’alerte ? Pas pour Anouk, apparemment. Dans « Maman a tort », de Marc Fitoussi, cette jeune collégienne débarque dans la compagnie d’assurances dans laquelle travaille sa mère, Cyrielle (Émilie Dequenne), pour y effectuer son stage de troisième. Et ce qu’elle y découvre la fait grandir brutalement. À la faveur d’une mission de « réorganisation d’un cagibi » pas très gratifiante, elle tombe sur un dossier révélant des malversations au cœur de l’entreprise, dans lesquelles serait potentiellement impliquée… sa propre mère. Anouk (Jeanne Gestin, aperçue dans « Le passé » d’Asghar Farhadi) va devoir faire face des décisions aussi cruelles que déterminantes pour le reste de sa vie…
On n’est pas sérieux quand on a 14 ans. Du moins le croit-on lorsque s’ouvre le film, sur une scène de « teuf » adolescente, où les corps se déchaînent sur la piste de danse. La jolie bouille d’Anouk se mêle à celles de ses amis dans une soirée où tout semble possible. Et pourtant, on décèle sur ce visage une gravité qui la distingue dès le départ des autres jeunes. Elle a quasiment tout pour être heureuse, Anouk : un père qui, quoique vivant loin d’elle, l’adore ; une mère avec qui elle entretient une grande complicité ; des copines cool et marrantes ; une vie de collégienne tout ce qu’il y a de plus normal. Vie qui vole en éclats lorsque Anouk se trouve confrontée aux lâchetés, aux petitesses et aux compromissions du monde de l’entreprise.
Ado futée deviendra grande
Cœur pur et épris de justice, elle se laisse émouvoir par le cas d’une mère de famille qui risque d’être expulsée avec ses deux enfants si la compagnie d’assurance refuse de l’indemniser, suite au décès de son mari. Et lorsqu’elle découvre que sa mère, en charge du dossier, a falsifié des documents pour empêcher le versement des indemnités, son monde s’effondre. Cette femme, en qui elle avait une confiance s’absolue, tombe de son piédestal. C’est la fin de l’enfance.
Le procédé qui consiste à nous faire observer le monde des adultes à travers les yeux d’une adolescente candide, nous place face à nos propres contradictions. Une mère peut-elle tout se permettre, tout justifier pour préserver son emploi ? Peut-elle mentir à sa fille sur des faits graves, sous prétexte de la protéger ? Et, une fois adultes, que faisons-nous de nos idéaux ? « Ah, c’est facile de croire que c’est facile de faire le bien ! », assène Cyrielle à sa fille. « C’est encore plus facile de ne rien faire », lui rétorque Anouk… Et ce qu’elle observe chez les collègues de sa mère – crise d’hystérie, mesquineries, immaturité – ne redore pas à ses yeux le blason des « grands ». Quoique mature, elle reste une jeune fille de son âge, et ne comprend pas forcément ce qui se joue dans cette affaire. Elle observe la comédie sociale du milieu professionnel sans en percevoir les tenants et les aboutissants.
Chronique sociale
Malgré la gravité du sujet, la satire n’est jamais loin dans le film de Marc Fitoussi. Il dépeint avec un humour grinçant les rituels soi-disant fédérateurs de la vie en entreprise (le calendrier de l’Avent dans lequel chaque salarié tiré au sort vient piocher quotidiennement son « chocolat surprise ») qui masquent l’ennui, la superficialité, le manque de sens de cette existence d’employé de bureau « métro-boulot-dodo » ; mais aussi des enjeux plus obscurs résidant dans des dossiers, eux-mêmes enfouis dans des placards verrouillés par des codes. Enjeux qui posent des questions tant éthiques que politiques. Le réalisateur dénonce la folie et l’absurdité d’un mode de management libéral qui enferme les salariés dans des dilemmes déontologiques insolubles grâce au chantage à l’emploi. Avec en sus, une interrogation plus large : est-ce bien ce monde violent, cynique, immoral que nous souhaitons léguer à nos enfants ?
Où voir le film ?
« Maman a tort », un film de Marc Fitoussi
En libre accès sur la médiathèque des Activités Sociales durant tout le mois de septembre
Avec : Emilie Dequenne, Jeanne Gestin, Camille Chamoux
France, Belgique, 2016 – 1 h 50 min.
Producteur délégué : Avenue B Productions / Coproduction : SND Groupe M6, France 3 Cinéma / Distribution : SND Groupe M6
Médiathèque : comment ça marche ?
1. Rendez-vous sur la rubrique Culture et Loisirs du site ccas.fr, et identifiez-vous à l’aide de votre NIA et de votre mot de passe. Cliquez sur le bloc Médiathèque.
Si vous avez déjà crédité votre compte et activé le contrôle parental, passez à l’étape 4 !
2. Créditez votre compte. Cliquez sur le bouton « Je me connecte », puis sur votre nom qui s’affiche. Dans le menu déroulant, allez dans la rubrique « Créditer mon compte », puis laissez-vous guider.
3. Activez le contrôle parental. Certains films ne sont pas accessibles à tous les publics. Pour y accéder, il faut définir un code à 6 chiffres : cliquez sur votre nom en haut à droite, puis sur « Mon profil » dans le menu déroulant, et suivez les instructions.
4. Pour accéder au film complet, il faut saisir votre code parental, après avoir cliqué sur l’affiche du film.
À noter : une fois votre règlement en jetons effectué, ces vidéos sont accessibles durant 48 heures. Certains contenus de la médiathèque sont en accès libre, d’autres sont payants. Pour ces derniers, vous réglez la location de films, livres, bandes dessinées, titres de presse en ligne à l’aide de jetons, achetés avec votre carte bancaire. Le prix en jeton est indiqué sur chaque livre ou film (1 jeton = 0,25 euro).
Tags: Coups de coeur Médiathèque Travail