Marcel Paul et l’indépendance énergétique

Manifestation des électriciens et gaziers à l'occasion du 75e anniversaire de la nationalisation des industries électriques et gazières, Marseille, avril 2021.

Manifestation des électriciens et gaziers à l’occasion du 75e anniversaire de la nationalisation des industries électriques et gazières, Marseille, avril 2021. ©Éric Raz/CCAS

Le quarantième anniversaire de la disparition de Marcel Paul est l’occasion de rappeler qu’il a constamment exprimé, comme ministre et comme syndicaliste, la nécessité pour la France de viser l’autonomie énergétique. Une préoccupation qui résonne avec notre actualité.

Lorsqu’il prend ses fonctions de ministre de la Production industrielle dans le gouvernement du général de Gaulle le 23 novembre 1945, Marcel Paul constate que la pénurie énergétique qui frappe la France est pire encore que ce qu’il pensait. À la suite d’une sécheresse prolongée, les barrages sont au plus bas. Et les centrales électriques manquent de charbon, car les importations prévues, en particulier en provenance des États-Unis, n’arrivent pas : 200 000 tonnes de houille seulement ont été déchargées dans les ports, au lieu des 525 000 promises.

« La puissance cumulée de nos installations est inférieure de 12 à 13 % à nos besoins de pointe, ce qui a expliqué les décrochages que nous avons connus ces derniers jours, particulièrement en province », souligne Marcel Paul. Le nouveau ministre n’a d’autres solutions que d’annoncer « des mesures de restriction spectaculaires et pratiques », de sobriété dirait-on aujourd’hui, indispensables pour passer l’hiver.

La nationalisation pour relever la France

S’adressant à nouveau au pays dans une allocution radiodiffusée le 12 janvier 1946, Marcel Paul a la satisfaction de faire savoir que la situation énergétique s’améliore. Le ministre est heureux d’annoncer « une première série de mesures de relâchement » même si les économies restent de mise. « Nous sommes et resterons encore longtemps pauvres en énergie. Ma confiance en vous est totale pour combattre tout gaspillage d’électricité, même le plus insignifiant d’apparence », lance-t-il. Mais sa politique est loin de se limiter à ces injonctions et vise une tout autre ambition.

Nos richesses en houille blanche ne sont exploitées que pour un tiers, et cela, parce que de gigantesques intérêts privés se sont opposés aux intérêts de la nation.

« Le pays a connu cette terrible crise parce que son équipement électrique est insuffisant. […] Nos richesses en houille blanche ne sont exploitées que pour un tiers, et cela, parce que de gigantesques intérêts privés se sont opposés aux intérêts de la nation. » Et d’annoncer le dépôt devant l’Assemblée du projet de nationalisation de l’électricité et du gaz, qui « entend doter notre économie de l’outillage moteur qui lui est indispensable pour assurer le relancement de notre industrie, le relèvement de la France ». Cette nationalisation sera, on le sait, la grande œuvre de Marcel Paul.

illustration 75 ans du statut, Marcel Paul et Ambroise Croizat signent le statut national

En 1946, Marcel Paul et Ambroise Croizat, respectivement ministre de la Production industrielle et ministre du Travail et de la Sécurité sociale, co-signent le Statut national du personnel des Industries électriques et gazières. Illustration : Frédéric Guyot/CCAS.

Au gouvernement durant onze mois seulement, il ne sera plus ministre au moment de l’inauguration du barrage de Génissiat, sur le Rhône, en 1948, le premier résultat de ses efforts en faveur de l’équipement hydro-électrique de la France. Redevenu syndicaliste, il n’aura de cesse, au nom de l’indépendance nationale, de défendre l’hydro-électricité contre le thermique, les « hydrauliciens » contre les « terreniciens « , comme il le disait lui-même, les derniers étant par définition soumis aux aléas économiques (instabilité des cours) comme politiques (risque de rupture brutale d’approvisionnement en cas de conflit).

Le mix énergétique s’est aujourd’hui développé mais cette opposition théorisée par Marcel Paul entre énergies importées – charbon hier, gaz naturel aujourd’hui –, dont l’approvisionnement est toujours fragile, et énergies nationales – renouvelables et nucléaire – reste très pertinente pour penser toute politique énergétique.



Marcel Paul, une vie

Marcel Paul et l’indépendance énergétique | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 16736 Photos identite Marcel Paul MiniatureEnfant de l’assistance publique devenu électricien, résistant déporté devenu ministre, artisan de la nationalisation d’EDF-GDF et des Œuvres sociales de leurs agents : découvrez en dix épisodes l’itinéraire d’un homme quia marqué durablement la mémoire des électriciens et gaziers.

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