« Psiconautas » : attention, âmes fortes !

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©Eurozoom

Noir et poétique. « Psiconautas », le film d’animation des Espagnols Pedro Rivero et Alberto Vazquez, sélectionné dans la programmation 2017 de l’Acid, partenaire de Visions Sociales, a remporté le prix Goya, l’équivalent de nos césars. Sorti en salle le 24 mai dernier, il tranche par sa radicalité.

Au commencement était une explosion. Un accident nucléaire. Il a ravagé une île industrialisée et prospère. Il n’en reste que des ruines et des enfants abîmés. « Nous sommes les oubliés. Nous sommes les orphelins. Notre avenir est dans les ordures. Il n’y a plus de futur. Le sang est notre loi », fait répéter une voix adulte à un enfant à l’ouverture du film. Et de lui rappeler la vie de l’île avant la catastrophe. Un territoire fertile où les familles étaient épanouies et où les ouvriers aux yeux vides se rendaient aux centrales en mode zombie.

Être maître de sa vie

C’est entre un noir écrasant et un rose suranné que le ciel enveloppe la génération de personnages d’Alberto Vazquez et de Pedro Rivero. Adapté d’une bande dessinée (d’Alberto Vazquez), le film donne vie à Dinki, la courageuse souris qui, chaque matin, pour affronter l’obsession d’un robot-réveil pour le temps qui passe et celle de ses parents pour un enfant Jésus qui pleure du sang, avale des cachets du bonheur. Avec ses compagnons, un lapin et un renard, elle décide de rejoindre la ville. Là-bas, un futur est possible. Mais la mer, aujourd’hui désertée de ses poissons, s’érige comme une frontière. Dinki espère entraîner dans ce périple l’écorché vif et mutique Birdboy, oiseau à grosse tête, addict aux joints et meurtri par la perte d’un père tué par des policiers zélés.

Sur le chemin, ils rencontrent une tirelire cochon incitant son propriétaire à « être maître de sa vie » face à une mère toxique, des rats soumis à un gourou, des fonctionnaires prêts à tirer sur une mère donnant la becquée à ses oisillons… Dans « Psiconautas » – entendez « voyageurs de l’âme » –, les enfants sont victimes de crises en tout genre : religieuse, économique, écologique et politique. Ce film choral, qui fait des allers-retours entre la descente aux enfers de Birdboy et le parcours initiatique de Dinki, nous emmène dans des espaces laminés, défigurés par les ordures toujours plus abondantes où règne la chasse au cuivre, devenue monnaie de survie. Sans conteste, le long métrage évoque les spectres d’une Espagne engouffrée dans la bulle immobilière.

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La nature comme dernier refuge ?

La force du film, c’est aussi les émotions perceptibles de ces ados animaux. Derrière leurs traits ronds communs aux albums de jeunesse se jouent des choix de vie et des positionnements : la tentation de l’individualité, la drogue, la peur… Sans oublier la médiocrité des adultes. Ainsi, Birdboy, hanté par le deuil et ses hallucinations, est-il dans l’incapacité de s’ouvrir à l’amour de Dinki. L’innocence du graphisme contre l’horreur des situations. D’où, peut-être, cette interdiction aux moins de 12 ans. Mais les auteurs assument cet univers mortifère et fantastique. Et avouent avoir piqué quelques idées aux œuvres de Tim Burton.

Y a-t-il de l’espoir dans « Psiconautas » ? Peut-être dans cette forêt anormalement verdoyante, cachée derrière le bois inquiétant de l’île. On le découvre avec Dinki et on comprend que ce territoire a été cultivé, préservé jusque-là par le mystérieux Birdboy. La nature comme dernier refuge de l’humanité…

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