Changer de regard sur le handicap au contact de professionnels, d’associations et de personnes concernées, mais aussi au travers de l’humour : tel était le pari qu’a fait la CMCAS Berry-Nivernais, le samedi 13 octobre dernier. On y était, et on a rencontré Marielle Rivière, auteure du « one-woman-show assis » « Rolling Woman ».
À Bourges, le samedi 13 octobre s’annonçait sous les meilleurs auspices. Arrivés sur le complexe sportif de Vauvert, les participants étaient accueillis dès 9h30 par les inventions locomotrices et les fauteuils de l’association locale handisport Magel’hand. De quoi tenter une immersion en terrain inconnu sous le regard, légèrement caustique, des personnes en situation de handicap présentes.
Après le petit déjeuner et la minute sportive, l’heure était aux conférences et à la projection de deux films sur les séjours pluriels, l’un à la colo de Signes et l’autre au centre de vacances d’Anglet, qui permettent aux bénéficiaires en situation de handicap de partir seuls en vacances avec la CCAS. Le moment également de rappeler le caractère historique de la prise en charge des personnes handicapées par la CCAS et les CMCAS. Pionnières, les Activités Sociales de l’énergie intégraient dès les années 1970 des enfants en situation de handicap au sein des colos, allant à l’encontre des lois Jeunesse et Sport d’alors : plus de personnes isolées, plus de marginalisation, grâce au docteur Kipman, médecin-conseil à la CCAS, et au docteur Boyer. En 1975, devant le succès de cette initiative, la première loi sur le handicap fut d’ailleurs rédigée et présentée au Parlement par la ministre de la Santé, Simone Veil.
Mordue de colos, Sophie Raclin, 37 ans, présente avec ses parents lors de cette journée, nous a ainsi conté son amour des séjours pluriels : « Je pars deux semaines chaque été, dans des séjours que je choisis parmi ceux sélectionnés par mon père. Mes vacances préférées sont à Kaysersberg et à la montagne. Cet été, j’étais à Savines-le-Lac, j’ai vu des marmottes et je suis montée à cheval ! On s’est aussi bien amusés lors de la soirée dansante. J’ai même embarqué sur la piste un monsieur en fauteuil roulant, et tout le monde nous a rejoints. C’est important pour moi que toutes les personnes soient mélangées. L’occasion idéale de se divertir tout en apprenant sur soi. »
L’après-midi, direction le Hublot, l’une des salles de spectacle de Bourges, pour aller assister au one-woman-show « Rolling Woman ». Si l’information reste nécessaire pour comprendre une situation, l’humour sert de liant. La CMCAS Berry-Nivernais et son président Gaël Classen ont donc vu en Marielle Rivière, créatrice et actrice de ce spectacle découvert au festival Off d’Avignon, l’occasion de présenter le handicap sous un autre angle. Elle-même en situation de handicap, Marielle Rivière emplit la scène de son aura et de son humour sans compromis, et aborde dans cette « tragi-comédie en 13 tableaux » tous les aspects du handicap, y compris les plus sombres.
Rolling Woman, en roue libre sur le handicap
Interview en roues libres (dans tous les sens du terme) pour cette humoriste de talent qui nous a reçus après un échange avec toute l’assemblée.
Marielle, bravo pour votre spectacle, que l’on sent très personnel. C’est votre histoire que vous nous contez ?
Oui, c’est mon parcours, avec une partie romancée bien sûr. Je ne suis pas née handicapée, j’ai eu un accident de voiture avec mon mari et mon fils aîné et je m’en suis moins bien sortie qu’eux. Le résultat est tombé : je ne marcherai plus. Ça a été très dur, vous pouvez vous en douter. En fait, c’est un combat au quotidien, et c’est ce que j’exprime dans mon spectacle. Évidemment, il y a le regard des autres, mais aussi et avant tout le regard que l’on porte sur soi.
C’est un moyen d’exorciser tout ce que vous avez pu vivre ?
C’est en effet une sorte de thérapie, qui a été longue et difficile. Je suis actrice de métier, mon mari est régisseur. Je faisais partie de troupes avant mon accident. Après, j’ai bien senti que je n’y avais plus ma place. On a décidé pour moi, comme si c’était d’une logique implacable. Les gens m’ont désignée comme « incapable », mais j’avais toujours envie de faire de la scène. Mon mari m’a beaucoup aidée. Quand des couples se brisent après un tel drame, cela a consolidé le nôtre. J’ai réappris à me faire confiance, à m’aimer, à vivre en un mot… mais différemment. Suite à l’accident, j’ai eu deux autres enfants, et j’ai monté ce spectacle que je propose en deux formules. Celle complète, que vous venez de voir, et un format plus court que nous proposons aux entreprises et écoles, basé sur l’improvisation et la participation.
Ce spectacle représente donc une vraie revanche ?
Un peu. Je pensais que monter seule sur scène en fauteuil serait compliqué, et finalement, ça fonctionne bien. En abordant toutes les difficultés du handicap, on parle aux personnes dans la même situation, on permet aux autres de découvrir notre situation par le biais de l’humour. Une fois, une personne m’a confié n’avoir pas osé rire… C’était justement le moment ! Moi, quand je suis sur scène, j’oublie tout. C’est vrai que je me permets des choses à propos du handicap qu’une personne valide ne pourrait pas se permettre. Les gens peuvent vite devenir lourds en essayant de dédramatiser une situation. Ils ont peut-être raison finalement, mais cela reste un sujet très, très sensible.
En parlant de critique, vous n’y allez pas avec le dos de la cuillère : tout le monde en prend pour son grade, surtout l’État. À un moment, vous parlez d’une agence louant des personnes en situation de handicap aux hommes et femmes politiques. Cela existe-t-il vraiment ?
(Rires) Non, bien sûr ! Mais nous utiliser comme faire-valoir revient au même. Il n’y a qu’à regarder la télévision pour s’en apercevoir. Les politiques sont emplis de bonnes intentions… devant les caméras. Derrière, par contre, ce sont les mêmes qui osent rejeter la proposition de loi visant à mieux rémunérer les accompagnants d’enfants en situation de handicap afin de mieux les scolariser… Il n’y a pas grand-chose à ajouter, à part peut-être que c’est leur regard à eux que l’on devrait changer en premier.
En savoir plus sur les séjours pluriels
Allergies, handicap, maladies chroniques, besoins particuliers… Les séjours pluriels sont ouverts aux enfants et aux adultes ayant des besoins particuliers en matière d’accompagnement, de surveillance ou d’adaptation d’une activité.
Séjours pluriels adultes
Vous séjournez sans votre famille et participez, selon vos possibilités et vos souhaits, à la vie collective et aux activités proposées. L’équipe du centre de vacances n’est pas spécialisée mais est sensibilisée aux problématiques liées au handicap. Elle est renforcée par des assistants sanitaires qui vous accompagnent, aident et créent les conditions avec toute l’équipe du centre de votre accueil inclusif dans les activités proposées à tous.
Ouverts aux ouvrants droit ou ayants droit aux Activités Sociales, en situation de handicap, sous certaines conditions.
Plus d’infos sur ccas.fr, rubrique Vacances à mon rythme
Séjours pluriels Jeunes
Si votre enfant a une allergie alimentaire, une maladie chronique stabilisée (diabète mucoviscidose, épilepsie, intolérance au gluten, etc…) trouble du comportement ou un handicap, son séjour nécessite la prise en compte de ses besoins particuliers en matière d’accompagnement pour certains actes de la vie quotidienne.
Ouverts aux ayants droit mineurs âgés de 4 à 17 ans.
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